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ACTE II ; Prédateurs et proies entament leurs sinistres comédies [TERMINE]

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MORPHÉE TROUVE QUE C'EST CLASSE DE S'APPELER
Lill Saether
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Derrière la porte close, le monstre attendait. Il y avait des traces de sang et j’y ai plongé mes mains avides.

Elle fend la foule, ombre discrète qui n’en a pas fini de se faire bousculer par les habitants paniqués. Les images sont encore gravées dans son esprit et les mots résonnent à ses oreilles. Un léger sourire, mesquin et désabusé, étire ses lèvres pâles. Quelque part, rien ne pourrait les surprendre et même ici, le pire pourrait arriver. Antalis n’a rien de sur et sous la sécurité bien polie et façonnée que tous affichent, les mêmes rôdeurs s’en donnent à cœur joie. Et elle, se prend au jeu.

Comme toujours. Parce qu’il n’y a que ça qui bouscule un peu les sombres nuages accumulés au dessus de sa tête. Un nouveau défi pour tenter de gagner, un nouveau défit pour que la lumière éblouissante la laisse suffisamment longtemps aveugle pour qu’elle ne remarque pas les chemins sinueux qu’elle a empruntés.

Sa silhouette a dépassé la foule, elle marche à grandes enjambées vers un point précis. Vidée, une montagne de malheurs, un antre que peu visitent. Elle ne s’y est jamais risquée, auparavant. Quand elle était enfant, elle aimait entendre les histoires racontées par Abel. Sa voix prenait des accents menaçants et sous la couette qui prenait des allures de bouclier, elle voyait luire la légère lueur pour éclairer son visage. C’était des contes un peu sombres, un peu réels si elle en croyait les rumeurs. Elle n’avait jamais osé leur donner un visage mais maintenant, l’occasion était trop belle. C’était un chemin à tenter d’emprunter, comme le reste, un coup à risquer. Elle avait très envie d’essayer et elle n’allait pas s’en priver.

Et sa lente ascension, la montagne qui se ferme à ses interrogations, la porte qui cherche à se dérober à ses yeux curieux, tout est un obstacle de plus pour qu’elle ait envie de le détruire.

Son avancée se précise. Elle distingue les contours dont on lui a parlé. Elle se dit qu’elle devrait reculer mais c’est trop tard et quelque part, l’incertitude la rassure. Elle colle son sourire arrogant à son visage, même si elle a l’impression qu’il lui arrache la peau à chaque expression fausse. Et le silence est coupé, par la lourde porte qu’elle trouve curieusement ouverte.

Ses sourcils se froncent, son sourire se bloque. C’est trop facile. Quelque chose ne va pas et elle craint de s’aventurer trop loin, de tomber dans un piège. Son repère devrait être fermé et cette porte est pourtant ouverte, elle distingue son obscurité et elle pourrait s’y faufiler facilement.

Et elle le fait. Et son souffle se bloque. Sous ses yeux médusés, une scène impossible à imaginer se dessine. La légère lumière de l’extérieur suffit à faire voir le visage tuméfié, envahi par les bleus. Le corps est à moitié disloqué, la chevelure pâle baigne dans son sang carmin. Elle voit le corps trembler de douleur, les contusions qui s’y dessinent comme autant de toiles d’araignée. Elle n’y croit tout simplement pas, une douleur pure, sourde, doit s’écouler de la silhouette avachie. Et en relevant le regard, elle craint le pire. Horrifiée, rendue muette par cette découverte qui lui fige le sang.

Parce que c’est impossible, impossible, tout simplement incroyable et ça n’a pas pu arriver.

« C’est… toi qui as fait ça ? »

Une question en suspens. Son regard se fixe sur un visage dont elle n’arrive pas à distinguer les sentiments. Elle est étrangère, ici. Elle n’est pas la bienvenue. Mais même si sa course folle s’est arrêtée, le résultat la plonge dans un bain glacé auquel elle ne peut pas se soustraire.

Cela n’aurait pas dû se passer ainsi.

Elle manque d’éclater d’un rire nerveux.

Tout est fini, c’est trop tard. Et sous mes yeux explose une sombre victoire.
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Silja L. Reysdóttir
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MessageSujet: Re: ACTE II ; Prédateurs et proies entament leurs sinistres comédies [TERMINE] ACTE II ; Prédateurs et proies entament leurs sinistres comédies [TERMINE] 300126374f74efad852d0Ven 18 Mai - 21:57



& THE LAST KNOWN SURVIVOR STARTS HIS PRAY;

FOR WE KILL WITH THE SKILL TO SURVIVE.
L’obscurité. C’est ce qui frappa en premier la jeune femme lorsqu’elle ouvrit à nouveau les yeux. Son regard qui cherchait désespérément une source de lumière eut beaucoup de mal à s’adapter pendant les quelques minutes qui suivirent son réveil. Allongée sur le sol froid et rocheux, Silja se redressa autant qu’elle le put pour étirer ses muscles endolories et ankylosés. Où était-elle ? Faisait-il encore jour ? Combien de temps avait-elle dormi ? Que s’était-il réellement passé ? Tant de questions se bousculaient dans sa tête sans trouver ne serait-ce qu’un semblant de réponse. Envahie par le doute et par l’appréhension, la demoiselle préféra garder le silence, le temps que son esprit puisse enfin analyser correctement la situation. Elle avait réellement peur. Ça aurait été mentir que d’affirmer le contraire. Malgré sa force et son mauvais caractère légendaire, Silja n’en restait pas moins humaine et imparfaite. Alors, c’est avec cette boule de crainte nouée au creux de son ventre que la petite blonde entreprit de se lever avec discrétion. Pas âme qui vive à l’horizon. Pendant un instant, elle avait même pensé être au cœur d’un de ses pires cauchemars : seule, abandonnée de tous dans le néant le plus total. Mais l’humidité ambiante, sa vision troublée et son malaise respiratoire ne pouvait que la conforter dans son idée première : non, elle ne rêvait pas. Elle avait bien été faite prisonnière. Et à cette pensée, son cœur faillit étouffer son dernier battement.

Petit à petit, l’obscurité avait percé son regard et s’était laissée apprivoisée. Tremblante, Silja n’avait toujours pas osée s’éloigner des murs. Tandis qu’elle avançait dans le repère de son kidnappeur, ses mains n’avaient de cesse de chercher le contact tranchant et dur des parois rocheuses. À un moment, elle s’était même écorchée la main sur un bout de pierre plus aiguisé que ses autres congénères. Mais même à cet instant, elle avait continué d’avancer. Elle le savait : sa vie en dépendait. Quand bien même cette dernière n’aurait plus tenue qu’à un fil, elle aurait tout fait pour s’y accrocher. L’espoir n’était pas vain. Du moins, Silja voulait encore y croire.

La victime retint son souffle. Il était là, dos à elle. Figé telle une statue de glace. Que pouvait-il bien préparer ? Et pourquoi l’avoir emmené jusqu’ici ? Elle n’en n’avait pas la moindre idée. Mais une chose était sûre : elle voulait vivre assez longtemps pour pouvoir se passer de ces informations. Mourir n’était vraiment pas au programme du jour. Balayant les lieux d’un regard circulaire rapide, Silja remarqua très vite l’immense porte entrouverte d’où parvenaient quelques rayons de soleil. Cet espoir soudain de liberté la transperça de part en part. Pendant ces longues minutes d’errance dans le noir, elle en été arrivée à oublier sa propre identité. Mais désormais, elle se souvenait. Oui, elle était Silja. Elle était invincible.

Un pas puis un second. La machine s’était mise en marche. Sa main délaissa rapidement le mur auquel elle s’était désespérément accrochée. Silencieuse et rapide comme un oiseau de proie, elle attendit de n’être plus qu’à un mètre de sa cible pour le surprendre avec une réplique digne des meilleurs films d’action :
    ▬ « Pauvre con… on t’a jamais dit de ….PAS TOURNER LE DOS A UN ADVERSAIRE ? »
La dernière partie de sa phrase s’accompagna d’un violent coup de pied dans les reins de son agresseur. L’homme tomba à genoux, sûrement déstabilisé par la puissance de frappe. Elle aurait pu en rester là et s’enfuir certes, mais malheureusement pour lui, elle était en colère. Très en colère.

Aucun des protagonistes n’aurait pu vraiment dire combien de temps avait duré l’affrontement. Le déchainement de rage et de violence dont ils avaient fait preuve les avait déconnectés loin de toute réalité. Comme s’il n’était plus question de perdre ou de gagner mais plutôt de rester en vie ou de mourir. Il faut dire qu’ils étaient tous les deux dans un état déplorable. Silja avec ses cheveux en bataille, sa lèvre fendue et son front ouvert ressemblait à une véritable sauvageonne. Le sang issu de sa blessure à la tête avait coagulé sur son œil droit, la rendant presque borgne. Le croquemitaine quant à lui, n’avait plus rien d’humain. C’était devenu une bête blessée et brutale.

C’était la fin. À califourchon sur son adversaire épuisé, Silja enchainait de puissants coups de poings sans lui laisser de répit. Gauche. Droite.
    ▬ « ALORS ? »
Gauche. Droite. Gauche. Droite.
    ▬ « C’EST QUI LA… »
Gauche. Droite. Gauche. Droite. Ses propres poings commençaient à saigner sous la violence des heurts.
    ▬ « DEMOISELLE EN DETRESSE, HEIN ? »
Gauche…Droite. Essoufflée et fatiguée, elle ralentit la cadence jusqu’à l’arrêt total de mouvement. Sous le coup de l’épuisement, elle murmura une ultime provocation entre deux respirations douloureuses :
    ▬ « Alors… tu…réponds…pas ? »
Il fallait se rendre à l’évidence : il venait de s’évanouir, vaincu par autant de bestialité. Alors calmée par cette victoire, Silja se laissa tomber juste à côté du corps de son opposant. Elle ne craignait même plus qu’il se réveille. Étendue par terre, ses longs cheveux blonds éparpillés comme de légers fils d'or semblaient créer une lumineuse auréole autour de sa tête, tandis que ses grands yeux bleus perdus dans le vague scrutaient l'éperdue lenteur du temps qui s'écoulait. Elle se mit à rire avec nervosité sans pouvoir s’arrêter. Je l’ai bien eu cet enfoiré.

Elle ne s’était pas résolue à sortir. En réalité, elle voulait garder un œil sur celui qu’elle avait combattu avec tant de hargne. Mais très vite un doute s’était immiscé dans son esprit : et si personne ne venait jamais la chercher ? Elle pourrait bien rester là pendant des années sans que personne ne s’inquiète de sa disparition. Et puis…Où était-elle au juste ? Assise dans un renfoncement de la roche, Silja tâta sa poche droite et en sortit son paquet de cigarette. Elle entreprit alors de réitérer l’opération avec sa poche gauche pour récupérer son briquet. Plus là. Elle avait dût le perdre en route. Désappointée et frustrée, la jeune femme resta à contempler les quelques doses de nicotines restante dont elle ne pourrait faire usage pour l’instant. Néanmoins, bien décidée à s’en griller une rapidement, la jeune femme se leva et donna au passage un petit coup de pied à l’inconnu qui se réveilla en sursaut en se tordant de douleur. Elle porta alors sur lui un regard lourd de signification. T’as pas intérêt à bouger, je reviens. Croix de bois, croix de fer : si je mens je vais en enfer…et je t’y emmène.

Alors qu’elle s’était rapprochée de la sortie, un événement inattendu vint perturber son plan.
    ▬ « C’est… toi qui as fait ça ? »
Silja leva les yeux au ciel en soupirant.
    ▬ « Non c’est la petite souris. D’ailleurs, si tu la vois préviens-moi parce qu’elle m’a aussi grave arraché la gueule…Non mais sans blague : bien sûr que c’est moi ! Mais bordel, tu vois quelqu’un d’autre ici à part ….ça ?»
Elle désigna d’un bref mouvement de tête le « pauvre bougre » allongé par terre dans son propre sang. Pas choqué par cette image, Silja s’empressa tout de même de détourner le regard. Pour rapidement se changer les idées, elle pinça une cigarette entre ses lèvres et dût faire quelques efforts d’élocution pour continuer à parler.
    ▬ « Qu’est-fe que fu fous-là ? »
Elle retira le filtre remplis de tabac de sa bouche et cracha un élégant filet de sang. Tant pis pour les bonnes manières. De toute façon, elle n’en n’avait jamais eu.
    ▬ « Et... t’aurais pas du feu par hasard ? »
C’était sans doute la dernière question à laquelle on pouvait s’attendre dans ce genre de situation. Sacrée Silja.




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MessageSujet: Re: ACTE II ; Prédateurs et proies entament leurs sinistres comédies [TERMINE] ACTE II ; Prédateurs et proies entament leurs sinistres comédies [TERMINE] 300126374f74efad852d0Mer 6 Juin - 17:26

La curiosité n’a d’exaltant que l’inassouvi. Et le mystère se resserre autour de ses mortelles chaînes.

Son regard posé sur la jeune femme est désabusé. C’est une blague. Une vaste plaisanterie. Elle jette un coup d’œil presque inquiet à la silhouette avachie, sans même se tracasser de son état. Elle devine ce qu’il est, elle sait que le monstre est tombé mais voir cette frêle jeune fille l’avoir mis à mal est perturbant. Elle essaie de ramener dans sa mémoire les souvenirs d’une soirée passée en sa compagnie, soucieuse de retrouver des bribes d’informations qui pourraient justifier la situation. Elle manque de rougir de honte en se rappelant de tout et ses yeux s’écarquillent alors que la surprise se peint sur ses traits. Et elle dit la chose la plus intelligente qui lui est sans doute passée par la tête, ce jour-là.

« Mais… C’est toi ! »

Remarque imparable, Lill. Oui, c’est elle. Et ça, c’est toi. Elle ferait mieux de s’inquiéter du pourquoi du comment au lieu de bêtement admirer cette gamine pour avoir royalement cassé la figure du Croquemitaine qui effraie les enfants. Elle ferait mieux de se demander à quoi tout ceci peut bien rimer, au lieu de se dire qu’au moins, elle est sauve.

Mais ce serait trop demander.

« Hey on ne sait jamais ! Ton mystérieux sauveur aurait pu s’échapper après lui avoir réglé son compte. » Elle montre d’un signe de tête la créature qui ne semble plus donner signe de vie, sans avoir envie de s’en approcher davantage. Elle est née ici, elle a entendu toutes les histoires qu’on dit à son sujet. Elle sait qu’il est à craindre et le regard qu’elle pose sur Silja – elle se souvient de son prénom dans un éclair de lucidité – est différent, teinté d’un respect un peu effrayé. Elle a vaincu le monstre de leur enfance, elle a touché à ce qui ne devrait exister que dans leurs cauchemars.

Mais elle en a souffert, sans doute et elle le voit aux marques, à sa difficulté, à la douleur qui semble émaner d’elle. Il a abîmé son joli visage et Lill résiste à l’envie d’aller brosser les cheveux blonds pour les lisser, y retirer le sang, les rendre à nouveau lisses et brillants. C’est gamin, c’est ridicule. Mais abîmer la petite poupée de cire aux si mauvaises manières et aux insultes toujours sur le bout de la langue, c’est un petit sacrilège qui peut coûter sa dignité et ses dents. Jolie démonstration.

Elle s’approche, sort négligemment son briquet pour allumer la cigarette. Son regard posé sur Silja est dur, a repris le sérieux qu’elle s’amuse souvent à quitter. Elle pose la main sur l’épaule frêle, sans fausse compassion, sans faux-semblants.

« Tout le monde est à ta recherche. La rouquine a fait un bruit monstrueux et je peux t’assurer que pas un seul habitant d’Antalis n’ignore ce qu’il s’est passé cette après-midi. Je pense que s’ils savaient ce qu’il s’est passé là, ils s’inquiéteraient davantage pour ce type. »

Elle ne peut empêcher ses habituels accents railleurs de reprendre le dessus. Mais ça n’importe pas, pas pour le moment. Ses yeux vrillent la petite silhouette qui ne devrait plus tenir très longtemps. Elle se penche vers elle.

« Maintenant. Je ne sais pas si tu sais où on est mais ce n’est sûrement pas chez toi. Combien de temps s’est écoulé depuis ton réveil ? Parce que je ne pense pas que tu puisses tenir bien longtemps. Même si tu as l’air d’être en meilleur état que lui. »

Elle s’éloigne, s’accroupit devant l’homme qui semble évanoui. Elle avise les cheveux pâles, la peau qu’on devine à peine. Son expression est cachée, comme toujours et elle a peur de découvrir ce qu’il peut se cacher derrière ce mystère ambulant. Sa main se tend, irrésistiblement attirée par l’envie de découvrir, de voir de…

« Pas si vite. »

Son souffle se bloque et elle recule, la main prise dans un étau. La poigne autour de ses os est dure, elle serre et elle sent son poignet bleuir. Sans même la regarder, il se lève, chancelant et la pousse d’un geste sec.

Le désœuvrement, mêlé à une mortelle surprise. Ses yeux sont grands ouverts et elle l’observe, affaibli, brisé, se relever et esquisser un sourire mauvais. Elle cherche des yeux Silja mais elle ne voit rien et avant même qu’elle n’ait pu faire un geste, il fait volte-face, s’enfuit, son rire tout en souffle traînant dans les airs.

« Je ne peux pas mourir, fillettes. Et j’aurai tout mon temps pour vous faire payer cela. J’ai sans doute plus de poison dans le cœur et dans le corps que vous tous réunis. »

Elle esquisse un mouvement pour le rattraper mais il est déjà parti, a emprunté un passage que lui seul connaît, sans doute et elle rage, intérieurement. Les poings crispés, elle s’avance, pour observer plus loin, pour envelopper de son regard le plus de surface possible. Mais il n’y a rein et elle sait qu’elles l’ont perdu.

« Il s’est volatilisé… Et qu’est-ce qu’il raconte ? Tu sais toi ? Hey ? Silja ? »

Pas de réponse. Elle se tourne vers elle, secouée.

Puisse la malédiction se détourner de leurs routes scellées.
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MessageSujet: Re: ACTE II ; Prédateurs et proies entament leurs sinistres comédies [TERMINE] ACTE II ; Prédateurs et proies entament leurs sinistres comédies [TERMINE] 300126374f74efad852d0Sam 14 Juil - 15:23




THE POISONED APPLE THAT HAS A SMALL BITTEN ;

MIRROR, OH MIRROR, WHO'S THE LONELIEST ON EARTH ?
Un dix lettres en vertical. Définition : abusent d’artifices. Proposition : hypocrites. Félicitations : grille complétée. C’était à n’y rien comprendre. Personne ne s’était réellement soucié d’elle jusqu’à présent. Il fallait donc attendre de se faire enlever par un malade mental pour un attirer l’attention des autres. Joie. Avec un peu de chance, elle aurait même le droit à un tout petit encadré à la dernière page du journal de demain. « Une fillette enlevée, retrouvée saine et sauve grâce aux autorités. ». Ou un autre mensonge du genre. Silja haussa des épaules en faisant rouler du bout des doigts sa cigarette toujours éteinte. La jeune femme leva un instant les yeux vers la lumière avant de s’en détourner, aveuglée par la clarté. Elle ne s’était pas encore remis de ses émotions et la voix de Lill lui faisait l’effet d’un affreux bourdonnement.
    ▬ « Woh ! Doucement ! Qu’est-ce que c’est que ces histoires ? La rouquine ? Les habitants ? C’est quoi ce foutu bordel, à la fin ? J’vois pas pourquoi tout le monde en fait tout un plat… »
Elle se retourna lentement vers son interlocutrice en soupirant et d’un geste de la main, elle lui intima de ralentir la cadence.
    ▬ « Alors comme ça, une pauv’ fille de Déméter disparait et tout le monde s’en retrouve bouleversé ? J’vous jure, qu’est-ce qui faut pas enttendre comme conneries… Tu me diras j’en ai rien à carrer. Ils peuvent bien croire que je suis morte, ça me fera des vacances. Ouais, avec un peu de chance, j’aurai plus à payer mon loyer à la vielle… »
Elle laissa échapper un petit ricanement en imaginant la tête de la mégère en train de pleurer sur son argent perdu. Peu importe les situations dans lesquelles Silja pouvait se trouver, ses préoccupations, elles, restaient toujours terre-à-terre. Une chose était sûre : chez cette demoiselle, la trivialité était une valeur sûre.

S’adossant contre la paroi glacé de la caverne, elle se laissa bercer par les tergiversions de Lill. Elle se sentait soudainement fatiguée. C’était plutôt étrange, ce n’était pas dans son habitude. Pourtant, elle ne s’attarda pas vraiment sur cette constations. Effet secondaire de la drogue, sans aucun doute. Quand elle entendit la dernière phrase de sa compagne d’infortune, la petite blonde se mit à rire de bon cœur. De son index, elle désigna son œil ensanglanté, à demis-clos.
    ▬ « T’as vu ma gueule ? J’ai l’air d’être en bon état, peut-être ? J’ai l’impression d’avoir perdu un œil dans la bataille…»
Elle reprit petit à petit son sérieux avant d’ajouter sur un ton désinvolte :
    ▬ « Bon comme tu l’as si bien dit, on est pas chez moi. Alors on va se dépêcher de se casser d’ici. M’enfin, je vais bien si ça peut te rassurer. C’est pas parce que je vais dépasser un peu la limite que ça va me tuer…lui par contre… »
Elle posa quelques instant sont regard sur l’inconnu baignant dans une marre de sang. Mais c’est qu’il parait en moins mauvais état. J’dois me faire des idées. Et c’est sur cette pensée anodine qu’elle se retrouva de nouveau la clope au bec :
    ▬ « Et sinon ce feu ? C’est pour aujourd’hui ou pour dem-… »
Sa voix se fit happer par une soudaine boule d’angoisse naissante, tout au fond de la gorge. Qu’est-ce qu’elle fout ? Elle aurait voulu lui dire de déguerpir. De crier de toutes ses forces. De briser la main de ce type pour libérer Lill de son emprise. De courir avec elle vers la sortie, sans se retourner. Mais son corps ne répondait plus. Les voix pourtant si proches se firent lointaines. Sa vue se troubla, recouverte par un voile blanc semblable à un linceul mortuaire, tandis que la cadence saccadée de sa respiration s’accéléra, comprimant sa cage thoracique avec violence. « Je ne peux pas mourir ». Ce fut la dernière phrase dont elle put saisir le sens. Mais moi, est-ce que je vais…

Et sans fracas, la cigarette s’abattit sur sol.


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Secrets arrachés, mystères ensevelis. La clé est sur ton chemin.

Elle secoue la tête, fascinée. Cette fillette aux paroles d’adultes, à la mine bougonne et à l’apparence bien débraillée maintenant, il est vrai, l’amuse toujours autant. Pourtant, elle ressent toujours une amertume sourde poindre à chaque fois qu’elle lui parle. Elle a l’impression de voir une enfant désabusée, qui voudrait réclamer de l’aide mais qui ne le fait pas. Par fierté ? Parce qu’elle a déjà essuyé des refus ? Elle ne sait pas. Elle n’a aucune envie de se laisser attendrir, parce qu’elle a malgré tout devant elle le petit monstre qui a mis le Croquemitaine KO et elle oublie un instant ce qu’il vient de se passer sous ses yeux. Elle secoue la tête, les mots se bloquent dans sa gorge et elle veut parler mais elle ne peut pas, c’est trop et la crainte déferle, détruit, détruit, ses barrières tombent.

Le silence lui répond et elle a envie de secouer la frêle jeune fille parce que merde, Silja, reste pas plantée comme ça, moi aussi je crève de trouille, t’es blessée je sais pas quoi faire et il rôde, encore.

Elle attrape la jeune femme par l’épaule, ferme mais douce parce qu’il ne faut pas encore plus la blesser. Sa voix a une douceur un peu trompeuse parce qu’elle est plus habituée aux menaces voilées qu’à rassurer les gens mais elle fait de son mieux et de toute manière, elle sait qu’elle n’est pas vraiment écoutée.

« Viens, partons. On peut rien faire. »

Elle souffle, tout bas, marche un peu, comme un automate. Elle prend la petite main dans la sienne, familière, sans lui laisser de choix et la tire vers le bas, pour descendre la montagne, pour s’éloigner de l’horreur. Elle a bien fait de venir, au moins, même si le visage du monstre la hantera. Même s’il y aura toujours cette culpabilité sourde parce qu’elles l’ont laissé repartir et que, par les fondateurs, qui sait quel crime il pourrait encore commettre… ?
Elle décide de chasser ses doutes. Parler, parler, parler pour oublier.

« Je ne mens pas, il y a eu beaucoup de monde à ta recherche. »
Elle jette un coup d’œil par-dessus son épaule, se raidit. « Et de la sienne, aussi, je suppose… Il va revenir. Ils vont sans doute à nouveau chercher dans le Colisée. »

Elle laisse son regard virevolter sur les traits abîmés, capturer les images de ce qu’il a bien pu se passer et elle pose ses questions parce qu’elle ne peut pas s’en empêcher.
« Que voulait-il ? Que TE voulait-il ? »

Sa voix est glacée, ses yeux se plissent. Si elle ne lui dit pas, elle n’aura qu’à lui dérober ce souvenir et le garder mais elle espère qu’elle ne sera pas obligée d’en arriver là. Le Croquemitaine existe, vraiment, elle en a la preuve et elle qui combat les Elus pour ce qu’ils infligent aux habitants, elle ne s’embarrassera pas de scrupules pour savoir ce que peut bien manigancer cette légende devenue vivante.
Elle chuchote, lasse.

« Dis-moi, Silja… Qui sait, ça pourra aider et même si tu les hais tous, il faudra quand même attraper ce type, non ? »

Son regard se voile. Elle se demande comment attraper l’insaisissable. Elle se demande comment faire mourir quelqu’un qui dit ne pas pouvoir le faire. Son esprit s’embrume et elle veut savoir, viscéralement parce qu’elle a l’impression, confuse et limpide à la fois, qu’il détient une clé. Qu’il n’a pas parlé pour se vanter et qu’elle a laissé s’échapper un indice de taille.

Et il n’y a que cette jeune fille blessée, qu’elle soutient l’air de ne pas y toucher, histoire de ne pas se faire frapper, qui pourrait l’aider. Elle voit la montagne s’éloigner peu à peu derrière elles et sait qu’une fois qu’elle l’aura ramenée, elle perdra ses chances. Alors elle s’arrête, tout simplement, parce qu’elle ne fait plus semblant.

« Je t’offre mon briquet ! »

Un sourire éblouissant mais ses yeux ne mentent pas.

Dis-moi, dis-moi. Sinon… Sinon rien. J’ai juste besoin de savoir, Silja.

Son humanité s'affole, s'approche, repart. Sans succès de rédemption.
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